De nombreux chantiers à l’arrêt

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Les chantiers sont à l'arrêt. © Romain Rolland

Après l’annonce de l’arrêt de nombreux chantiers en raison du virus Covid-19, le gouvernement prévoit la diffusion d’un guide de bonnes pratiques afin d’assurer la poursuite des chantiers « dans des conditions de sécurité sanitaire satisfaisantes ».

 

« Les entreprises du bâtiment et des travaux publics sont essentielles à la vie économique du pays et à son fonctionnement, en contribuant à des besoins du quotidien des Français comme le logement, l’eau, l’énergie, la gestion des déchets, les transports et les télécommunications, a indiqué le ministère de la Transition écologique et solidaire le 21 mars 2020. Il est donc nécessaire d’œuvrer à la poursuite de leur activité, pour éviter une mise à l’arrêt totale des chantiers, qui déstabiliserait non seulement les entreprises concernées mais aussi l’ensemble de la chaîne économique. »

 

Malgré cette volonté du gouvernement, divers acteurs de la construction et des travaux publics avaient demandé l’arrêt des travaux en cours afin de protéger leurs salariés. Des ouvriers ont aussi exercé leur droit de retrait ou été contraints de rester à domicile pour assurer la garde de leurs enfants, quand ce n’est pas le manque d’acheminement de matériel qui a conduit à l’arrêt de l’activité.

 

Grand Paris express à l’arrêt

Ainsi, « suite aux mesures annoncées par le gouvernement ces derniers jours et après avoir consulté les entreprises qui réalisent les chantiers dont elle est maître d’ouvrage, la Société du Grand Paris a pris la décision de leur demander de suspendre temporairement leur activité dès aujourd’hui et de concentrer sans attendre leurs moyens sur la mise en sécurité de leurs chantiers », a annoncé l’établissement le 17 mars. Les chantiers du Grand Paris express, de par leur taille et leur complexité, nécessitent une participation et une coordination accrue de nombreux acteurs et services, « indispensable pour la bonne exécution » des travaux, notamment en matière de sécurité, pour les ouvriers, les riverains mais également en matière de préservation de l’environnement.

La Société du Grand Paris a suspendu les chantiers du Grand Paris express. © JGP

Toutefois, « les représentants des entreprises du BTP et le gouvernement se sont accordés sur plusieurs principes permettant de renforcer, dans les prochains jours, la continuité de l’activité du secteur et la poursuite des chantiers », fait valoir le ministère de la Transition écologique et solidaire le 21 mars. Il s’agit notamment d’assurer le respect des gestes barrière et le maintien des distances entre salariés. « Dans de nombreux cas, des réorganisations ou des ajustements des pratiques pourraient permettre la poursuite de l’activité », est-il estimé.

 

Recommandations à venir

Dans les prochains jours, les organisations professionnelles des entreprises du bâtiment et des travaux publics diffuseront un guide de bonnes pratiques qui viendra « préciser l’ensemble des mesures et des procédures applicables et accompagner les professionnels du secteur », indique le ministère. Celui-ci fournira « une série de recommandations pour assurer des conditions sanitaires satisfaisantes sur les chantiers et poursuivre les activités ».

 

« Dans le cas des chantiers de travaux publics, comme par exemple les infrastructures de transport ou les travaux de voirie, les grands maîtres d’ouvrage au niveau national et les préfets au niveau local coordonneront et prioriseront les chantiers à poursuivre ou à relancer. Dans le cas de chantiers très complexes, un délai pourra être nécessaire afin de définir des procédures adaptées. De même, une attention particulière sera portée au cas des chantiers au domicile des particuliers lorsque ceux-ci sont présents. »

 

Risque juridique

« Notre crainte est clairement, face au flou du gouvernement et compte-tenu du caractère totalement inédit de la crise du coronavirus, que des entreprises du BTP se retrouvent dans deux ans devant les tribunaux, attaquées par des maîtres d’ouvrage pour avoir interrompu de leur propre chef des travaux », indiquait un professionnel du BTP. Le gouvernement a donc invité « les donneurs d’ordre et entreprises à ne pas rechercher la responsabilité contractuelle des entreprises, de leurs sous-traitants ou fournisseurs qui, lorsque les conditions d’exécution ne permettaient plus de garantir la santé et la sécurité de leurs salariés, ont dû suspendre leur activité ».

 

A la Fédération française du bâtiment Grand Paris, on se veut rassurant : « Que ce soit un contrat de marché public ou privé, la notion de force majeure sera utilisée. C’est le cas actuellement et cela ne fait pas de doute. Dans ce cas, on doit donc stopper les travaux et transférer la garde de l’ouvrage au maître d’ouvrage, qui en est responsable, souligne-t-on. Cela fera naître des contentieux qui seront à l’appréciation des juges, qui pourraient avoir tendance à retenir la qualification de force majeure, surtout compte tenu de ce contexte inédit », indique-t-on. 

 

« Plus que la force majeure, qui effraie et dont la reconnaissance peut entraîner la résiliation du contrat, nous conseillons aux entreprises d’invoquer l’imprévision, avérée en l’occurrence (lorsqu’elle n’est pas exclue par le contrat) et qui conduit les cocontractants à s’asseoir, virtuellement, autour de la même table pour renégocier les termes du contrat », indique Anne Dumas-L’Hoir, associée en charge du département contrats et contentieux au sein du cabinet Sekri Valentin Zerrouk.